Retour sur la saga Tapie-Adidas

Le récit de la saga Tapie-Adidas, pour les expats curieux de comprendre un dossier qui inquiète les acteurs de l’Elysée version 2007.

saga tapie-adidas

A l’instar des juges enquêteurs, reprenons le début de cette histoire

 

Les juges poursuivent leurs investigations dans la saga Tapie-Adidas et retournent vers des dates qui semblent être le point de départ de l’histoire qualifiée par tous comme une escroquerie en bande organisée.

 

Bernard Tapie, homme d’affaire, a quelques ambitions politiques, et en 1992, c’est Pierre Bérégovoy, premier ministre qui lui ouvre les portes de l’Elysée, pour l’introduire au gouvernement.

 

La même année, Bernard Tapie, qui veut se consacrer à sa carrière politique, décide de céder la plus part de ses sociétés et demande à sa banque, le Crédit Lyonnais, de s’occuper de trouver un acquéreur pour Adidas.

Ravi du montant obtenu, pour une société acquise 2 ans plutôt et en difficultés financières, la transaction est signée.

 

En 1994, Tapie commence à faire de l’ombre au parti socialiste, totalisant 12% des résultats qui divise le parti.

 

La même année, Tapie est mis en faillite par Jean Peyrelevade, nouveau PDG du Crédit Lyonnais, et entame une bataille judiciaire.

 

 

En 1995, à l’approche des présidentielles, malgré la vente d’Adidas, Tapie est au bord de la faillite et le Tribunal de commerce doit statuer sur deux options :

  • Une liquidation judiciaire, entraînant son inéligibilité
  • Un simple redressement judiciaire qui lui permettrait de poursuivre sa carrière politique

 

Au final, le tribunal de commerce tranche, et met Tapie en simple redressement judiciaire

 

Une semaine après cette décision, Delors renonce à se présenter aux élections !

Considérant que Tapie avait la possibilité de diviser la gauche, l’affaiblissant de façon trop importante face à la droite.

 

Aussitôt après, le Tribunal requalifie sa décision, et la transforme en liquidation judiciaire, c’est la sortie de Tapie de la scène politique.

 

C’est en 1996, que Bernard Tapie se rend compte que le Crédit Lyonnais avais failli à sa tâche, et s’était porté acquéreur de l’enseigne Adidas sous le couvert de société Off-Shore.

Le Crédit Lyonnais avait en réalité racheté Adidas, avant de la revendre à Robert Louis Deyfus, une fois l’entreprise redressée, encaissant au passage une plus-value d’un milliard de francs.

 

 

Le Crédit Lyonnais attaque Tapie pour banqueroute frauduleuse, et l’homme d’affaire contre-attaque mais se trouve face au CDR (consortium de réalisation) qui n’est autre que l’Etat, et qui a pour mission de liquider les vieilles histoires du Crédit Lyonnais.

On se retrouve dans une situation gênante, ce n’est plus Tapie contre Le Crédit Lyonnais, mais contre l’argent de l’Etat.

 

Le procès opposant le CDR et Tapie n’en fini plus, et occasionne de lourdes dépenses d’état

 

En 2004, c’est Nicolas Sarkosy, en place à Bercy, qui proposera une médiation, qui sera finalement refusée, par le CDR qui campe sur ses positions.

 

En 2006, la cours d’appel condamne le CDR à verser 145 millions d’euros à Tapie, mais le ministre de l’Economie, Thierry Breton, estime que cette décision gratifie l’homme d’affaire d’un bonus de 20 millions d’euros et décide d’introduire un pourvoi en cassation.

 

Début 2007, au vu des magouilles reconnues du Crédit Lyonnais, les liquidateurs judiciaires exigent l’annulation de la revente d’Adidas, relançant de plus belle un dossier déjà bien encombrant.

Quelques mois plus tard, Nicolas Sarkosy remporte les présidentielles, avec le soutien de Bernard Tapie

Et hasard ou coïncidence, les choses s’accélèrent :

 

Un mois plus tard, décision est prise, initialement par Jean-louis Berloo (qui restera en place à Bercy durant seulement 4 semaines) selon les dires de Stéphane Richard (Directeur du cabinet du Ministre des Finance)

Jean-Louis Borloo démentira les propos de Stéphane Richard au micro de RTL, stipulant que personne ne l’a jamais sollicité dans ce dossier, ni durant les 4 semaines pendant lesquelles il était Ministre des Finances, ni après.

A défaut de savoir qui se trompe ou qui ment, une chose est sure, les investigations des juges mettent à jours des règlements de comptes.
Ca balance à Paris.

Il faut dire, que Borloo était, il y a 25 ans, l’avocat de Bernard Tapie, ce qui oriente quelques pensées sans objectivité.

 

 

Christine Lagarde, nouvellement nommée Ministre de l’économie, à la suite de Borloo, ne dément pas sa décision de soustraire le dossier Tapie/Adidas à la Justice ordinaire pour le diriger vers un arbitrage, constitué de 3 arbitres (au dessus de tout soupçon)

  • Pierre Mazeaud (ancien président du Conseil constitutionnel)
  • Jean-Denis Bredin (avocat)
  • Pierre Estoup (magistrat)

 

Décision prise à l’encontre des avocats en charge de ce dossier qui préviennent Christine Lagarde qu’il serait préférable de laisser la justice suivre son cours, et que les chances de gagner en appel étaient importantes

 

En juillet 2008, soit 9 mois plus tard, l’arbitrage se conclu en faveur de Tapie sur TOUS les points du dossier.

 

Le rendu des conclusions, permet à Tapie d’encaisser 403 millions d’euros sur les deniers de l’Etat, et ce, malgré des éléments probants remettant cette décision en cause :

 

 

L’un des 3 arbitres a menti quand il a déclaré n’avoir aucune relation avec Tapie, faute grave qui peut permettre la révision de l’arbitrage.

Concernant cette faute, Christine Lagarde, dit que la seule information qui lui a été transmise par Stéphane Richard est :

«il y a eu une petite difficulté concernant l’un des arbitres, mais elle a été résolue»

 

Des éléments juridiquement recevables pouvaient introduire un appel à cette décision

Pour expliquer sa position de ne pas faire appel, Christine Lagarde, répond qu’elle estimait que les chances d’annulation étaient faibles, et que les liquidateurs de Tapie avaient fait des concessions à hauteur de 70 millions d’euros.

 

Le CDR s’interdit de faire appel, alors qu’il en a les moyens financiers et juridiques

Le président du CDR, Jean-François Rocchi, rédige seul, sans en informer le conseil d’administration un protocole permettant à Tapie d’encaisser 50 millions d’euros à titre de préjudice moral (au final le montant perçu sera de 45 millions d’euros)

 

Et lorsqu’on demande à Christine Lagarde, pourquoi avoir autorisé une clause permettant à Bernard Tapie d’obtenir 50 millions de dommage et intérêt pour préjudice moral ?

La réponse est que lorsque l’Agence des participations de l’Etat (APE) lui a présenté les conditions de l’entrée en arbitrage, ce plafond était présenté comme une somme destinée aux liquidateurs des époux Tapie, ne pouvant pas deviner que c’était pour préjudice moral.

 

Les erreurs se sont empilées, et les investigations continues

 

En effet, Claude Guéant, secrétaire général de l’Elysée n’est pas écarté du débat, puisque mardi une perquisition a lieu à son domicile, ne révélant pour le moment rien de plus.

Une petite question commence a se poser, Nicolas Sarkosy ne serait il pas en ligne de mire de nos juges ?

D’autant qu’on apprend que les enquêteurs ont récupérés les agendas de l’ancien Président, et qu’à l’examen de ces derniers, on trouve pas moins de 18 rendez-vous avec Bernard Tapie, dont un, en novembre 2007, coïncident avec l’entrée en arbitrage du dossier.

 

L’affaire suit son cours …